samedi 22 juin 2019

EMC Lycée: La laïcité en France, une spécificité? Proposition activités pédagogiques

La laïcité en France
Des séquences pédagogiques sont proposées par Christophe Gracieux professeur agrégé d’histoire de l’Académie de Versailles sur enseigner la laïcité en EMC au lycée.
A partir des archives INA, rubrique jalons de l’histoire, un site pédagogique destiné aux enseignants et à leurs élèves. (Source: http://fresques.ina.fr/jalons/parcours/0165/la-laicite-en-france.html)

Objectifs pédagogiques général du thème:
. Comprendre le principe de laïcité et son histoire.
. Comprendre les enjeux de la laïcité, en particulier à l’école.
. Être capable de caractériser un comportement laïque.
. Exploiter un document audiovisuel : prélever, hiérarchiser et confronter des . informations dans ce document.
. Mettre en lien des documents audiovisuels et des textes de référence.

1er thème: La laïcité, fondement de la République française

Il s’agit de comprendre le principe de laïcité dans ses dimensions historique et juridique. Il constitue un des piliers du modèle républicain mis en place sous la IIIe République. Institutionnalisée par la loi du 9 décembre 1905 qui sépare les Églises et l’État, la laïcité a ensuite été érigée en principe constitutionnel en 1946, dans la Constitution de la IVe République.
Problématique:
Qu’est-ce que la Laïcité ?Quels sont sont ses principaux enjeux ?
Quelle est l’histoire de la laïcité en France ?
Quelles sont les exceptions au régime de séparation des Églises et de l’État ?
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L’histoire de la laïcité en France

Résumé vidéo 1: (durée 04m09s)
Questionnaire extrait vidéo 1
  • Quand est proclamé pour la première fois le principe de laïcité ?
  • Quelle institution est laïcisée la première ? Qui est à l’origine de cette laïcisation ?
  • Décrivez et expliquez la caricature sur laquelle des gendarmes sont représentés.
  • Comment est surnommé Émile Combes ? Pourquoi ?
  • Que prévoit la loi de Séparation des Églises et de l’État ? Pour répondre, vous pouvez aussi vous appuyer sur le texte de la loi :
  • Loi du 9 décembre 1905 concernant la séparation des Eglises et de l’Etat
  • En vous appuyant sur le reportage et sur le texte, montrez en quelques phrases que la loi de Séparation des Églises et de l’État est une loi d’équilibre et de compromis.
  • Relevez un argument favorable et un argument défavorable à l’entretien des églises par les communes.
  • À la fin du XXe siècle, quel élément conduit à repenser la laïcité ? Pourquoi cela soulève-t-il des difficultés ?
  • Que décide le président de la République Jacques Chirac dans son discours du 17 décembre 2003 ?
Fiche analyse du contexte historique de l’extrait vidéo 1 proposé par Christophe Gracieux pour Jalons de l’histoire.
La laïcité est un principe républicain fondamental. Elle a été affirmée dès la Révolution française, notamment dans l’article 10 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen du 26 août 1789 qui stipule que « nul ne doit être inquiété pour ses opinions, même religieuses, pourvu que leur manifestation ne trouble pas l’ordre public établi par loi. » Mais c’est sous la IIIe République que la laïcité s’est réellement définie et enracinée. Elle s’est inscrite dès les années 1880 dans une lutte entre le nouvel État républicain et l’Église catholique. Aux yeux des républicains, la laïcité est en effet le moyen de soustraire les Français à la tutelle de l’Église. La laïcisation de l’école constitue donc pour eux un enjeu fondamental. La loi Ferry du 28 mars 1882 remplace ainsi l’instruction morale et religieuse par l’instruction morale et civique et donne congé un jour par semaine aux élèves pour « permettre aux parents de faire donner, s’ils le souhaitent, à leurs enfants l’instruction religieuse en dehors des édifices scolaires ». Puis la loi Goblet du 30 octobre 1886 laïcise l’ensemble du personnel de l’enseignement primaire.
La laïcité est ensuite institutionnalisée avec la loi du 9 décembre 1905 sur la séparation des Églises et de l’État. Cette loi proclame en effet la neutralité de l’État à l’égard des différentes religions : « La République ne reconnaît, ne salarie ni ne subventionne aucun culte (…) » (article 2). La laïcité ne se réduit toutefois pas à l’exigence de la neutralité de l’État. Elle se fonde aussi sur la liberté de conscience ainsi que sur celle de culte, affirmées dès l’article 1er de la loi du 9 décembre 1905 : « La République assure la liberté de conscience. Elle garantit le libre exercice des cultes (…). »Puis en 1946 la laïcité est érigée en principe constitutionnel : l’article 1er de la Constitution de la IVe République dispose que « la France est une République indivisible, laïque, démocratique et sociale » (voir La Laïcite, principe constitutionnel républicain). La Constitution du 4 octobre 1958 reprend cette disposition dans son article 1er et ajoute : « Elle [La République] assure l’égalité devant la loi de tous les citoyens sans distinction d’origine, de race ou de religion. Elle respecte toutes les croyances. »
L’application du principe de laïcité suscite cependant de plus en plus de tensions à la fin du XXe siècle. C’est autour de la question du voile islamique porté dans les établissements scolaires que les controverses sont les plus vives. Une première affaire éclate en octobre 1989 lorsque trois élèves sont exclues d’un collège de Creil (Oise) après avoir refusé d’ôter leur foulard en classe (voir l’affaire du foulard islamique en 1989). Les atteintes à la laïcité sont par la suite plus fréquentes dans les services publics et l’espace public. Le président de la République Jacques Chirac crée alors en 2003 une commission de réflexion chargée de réfléchir à l’application du principe de laïcité dans la République, placée sous la présidence de Bernard Stasi. À la suite de la publication de son rapport, une loi encadrant le port de signes ou de tenues manifestant une appartenance religieuse dans les établissements scolaires publics est promulguée le 15 mars 2004. Elle stipule que « dans les écoles, les collèges et les lycées publics, le port de signes ou tenues par lesquels les élèves manifestent ostensiblement une appartenance religieuse est interdit. » (voir L’application de la loi sur la laïcité dans les établissements scolaires). Des Chartes de la laïcité sont par ailleurs adoptées, en 2007 dans les services publics et en 2013 à l’école.
Bibliographie :
BAUBÉROT Jean, Histoire de la laïcité en France, Paris, Seuil, 2013.BAUBÉROT Jean, Laïcité 1905-2005, entre passion et raison, Paris, Seuil, 2004.MAYEUR Jean-Marie, La Question laïque (XIXe-XXe siècles), Paris, Fayard, 1997.
RÉMOND René, Religion et société en Europe. La sécularisation aux XIXe et XXe siècles, Paris, Seuil, 2001.WEIL Patrick (dir.), Politiques de la laïcité au XXe siècle, Paris, PUF, 2007.
Éclairage média(Christophe Gracieux)
Consacré à l’histoire de la laïcité en France, ce sujet a été diffusé le 29 janvier 2015 dans le journal télévisé de France 2 de 13 heures dans un contexte très particulier. En effet, trois semaines auparavant, le 7 janvier 2015, un attentat terroriste a visé le siège de l’hebdomadaire satirique Charlie Hebdo à Paris. Douze personnes dont huit collaborateurs du journal, parmi lesquels les dessinateurs Cabu, Wolinski, Tignous et Honoré ainsi que le directeur de la publication Charb, ont été assassinés par deux terroristes djihadistes, les frères Kouachi. Puis, deux jours après, une prise d’otages sanglante a été perpétrée par un autre terroriste islamiste, Amedy Coulibaly, au magasin Hyper Cacher de la porte de Vincennes, à Paris. Quatre otages, tous de religion juive, périssent sous les balles d’Amedy Coulibaly. Après ces attentats, le président de la République François Hollande et le gouvernement de Manuel Valls appellent à la mobilisation en faveur de la laïcité, visée par les terroristes au même titre que la liberté d’expression. Ils engagent une « grande mobilisation » de l’école pour transmettre les « valeurs de la République ». Le 22 janvier 2015, la ministre de l’Éducation nationale Najat Vallaud-Belkacem annonce un ensemble de mesures pour redonner une place essentielle au principe de la laïcité. Parmi ces mesures figurent la célébration d’une Journée de la laïcité chaque 9 décembre, date anniversaire de la loi de séparation des Églises et de l’État, et la mise en place d’un nouvel enseignement moral et civique.
En outre, le matin même du 29 janvier 2015, François Hollande a reçu différents membres de la communauté éducative pour discuter de la laïcité. C’est pour cette raison que la rédaction de France 2 a choisi de consacrer un sujet à l’histoire de cette dernière. Du reste, ce sujet est immédiatement précédé par la diffusion de quelques plans de personnalités sortant dans la cour de l’Élysée, dont Najat Vallaud-Belkacem, simplement commentés par la présentatrice du journal télévisé Élise Lucet.
Le sujet prend quant à lui la forme d’une rétrospective des grandes étapes de la laïcité en France depuis les lois de Jules Ferry de 1881-1882 jusqu’à la loi du 15 mars 2004 interdisant les signes religieux à l’école. De manière classique, le sujet se compose uniquement d’images d’archives présentées selon un ordre principalement chronologique. Des images factuelles et d’illustration alternent avec des témoignages. Ceux-ci, obtenus entre 1981 et 2006, émanent de personnes qui ont toutes été confrontés d’une manière ou d’une autre à la laïcité. Témoignent notamment des instituteurs, un prêtre, un maire, une élève voilée et un chef d’établissement. Cependant, la dimension étatique de la laïcité est également perceptible dans le sujet à travers différentes représentations d’hommes politiques (gravures, photographies, caricatures et images filmées). Les hommes politiques (Jules Ferry, Émile Combes, Léon Blum et Jacques Chirac) mis en avant dans le sujet ont tous joué un rôle décisif dans l’histoire de la laïcité française.
C’est à l’école que la majorité des images sont consacrées, à commencer par les premiers plans non datés mais sans doute filmés sous la IIIe République. Cette prédominance atteste bien de la place essentielle qu’occupe l’école dans la question laïque. Il s’agit même du lieu des principales controverses. Des gravures non datées illustrent ainsi le conflit entre l’Église et la République aux débuts de la IIIe République : elles montrent successivement un policier décrochant un crucifix d’une salle de classe et des policiers raccompagnant des religieuses hors d’une école. Le plan d’une caricature non datée d’un instituteur et d’un curé écartelant un élève illustre particulièrement bien le conflit scolaire. De même, les polémiques sur le port du voile islamique dans les établissements scolaires survenues à la fin du XXe siècle et au début du XXIe siècle sont illustrées par des images d’archives et des interviews.
Transcription de la vidéo
La laïcité, c’est vraiment une valeur héritée de la Révolution française, mais elle a mis du temps à prendre corps.C’est Jules Ferry pendant la IIIe République qui rendra l’école laïque obligatoire avant une autre étape déterminante, la loi de 1905 sur la séparation de l’Église et de l’État. Retour sur ces décennies qui ont fondé un principe français. C’est la séquence archive du 13 heures, elle est signée Nicolas Lemarignier.musique(musique)Nicolas LemarignierC’est sur les bancs de l’école de la IIIe République que la laïcité proclamée par la Révolution de 1789 prend toute sa dimension.musique(musique)Nicolas LemarignierEn 1881, le ministre de l’Instruction publique Jules Ferry fait voter l’école gratuite obligatoire et laïque. On décroche les crucifix, les religieux sont expulsés des établissements scolaires.Ils verront d’un mauvais œil et pendant longtemps les instituteurs laïcs.Solange LangloisPour eux, c’était l’école sans Dieu et sans morale. Sans Dieu bien sûr, parce qu’il n’y avait plus les christs dans l’école, il n’y avait plus la prière, il n’y avait plus tout ça. Mais sans morale, il n’y avait pas la morale, leur morale à eux.Mais il y avait la nôtre, la morale laïque.Roger DenuxC’est la tolérance l’esprit de la laïcité, c’est véritablement la tolérance. Et l’école laïque est l’école accueillante à tous.Nicolas LemarignierLà où subsistent des écoles privées, on se dispute les élèves.JournalisteCombien il y avait d’enfants dans l’école religieuse ?Intervenante40 à 50 au moins.Journaliste40 à 50 au moins.IntervenanteOh oui, parce qu’il y avait un internat.JournalisteEt dans l’école laïque ?IntervenanteEh ben, il y en avait six ou huit.JournalisteCe n’était pas beaucoup.IntervenanteAh non !Nicolas LemarignierAprès Jules Ferry, Emile Combes est l’artisan de la loi de séparation de l’Église et de l’État en 1905, on le traite alors de bouffeur de curé.JournalisteLa droite dénonce en Monsieur Combes l’incarnation du diable.Nicolas LemarignierPourtant, il s’agit d’une loi d’apaisement sur le principe du chacun chez soi.JournalisteLa République ne reconnaît, ni ne salarie, ni ne subventionne aucun de ces cultes.Nicolas LemarignierLa liberté de conscience est garantie.Les édifices religieux qui appartiennent à l’État sont mis à disposition des cultes.Mais Don Camillo et Peppone, ça n’est pas qu’au cinéma. Au début des années 2000, à Stains, le curé et le maire communiste s’opposent sur la rénovation de l’église.Daniel RoussièreOn réclame un lieu qui soit digne d’un centre-ville et qui permette à l’église de jouer, non pas simplement un lieu de culte, mais un rôle dans le lien social.Michel BeaumaleLe patrimoine communal, c’est l’église, mais c’est aussi les écoles, des gymnases, la voirie, eh bon, il faut faire des choix. On ne peut pas tout réaliser.Nicolas LemarignierLa loi autorise, mais n’oblige pas les communes à entretenir les églises. En 1937, une circulaire du gouvernement Blum proscrit le prosélytisme à l’école, mais n’interdit pas les signes religieux.70 ans plus tard, le voile islamique va amener à repenser la loi et la laïcité.InconnueJ’ai essayé de rentrer dans le collège avec mon foulard ; mais quand j’arrive à la récré, ben, il y a ou le principal ou le principal adjoint qui me demande de le retirer, donc ça me dérange, oui. Non moi, si ce n’était pas par rapport à mes études, je ne le retirerais pas.Nicolas LemarignierJusqu’à quel point peut-on afficher son appartenance religieuse dans un établissement scolaire laïc ?Michel ParcolletMettre un foulard plus court que le vrai foulard et tout ça, ce sont des compromis qui finalement instaurent des situations très ambigües et très confuses. Et moi, je suis plutôt partisan d’une situation claire.Nicolas LemarignierEn 2004, le président Jacques Chirac tranche par la loi.Jacques ChiracLes signes qui manifestent ostensiblement l’appartenance religieuse doivent être proscrits dans les écoles, les collèges et les lycées publics.Nicolas LemarignierL’État doit-il financer la construction des mosquées ? Peut-on installer une crèche de Noël dans une mairie ? Aujourd’hui, les questions et les défis qui se posent au principe de la laïcité ne manquent pas.
La Laïcite, principe constitutionnel républicain
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Résumé extrait vidéo 2 : la laïcité constitue un principe constitutionnel républicain. Toutefois, sa définition reste délicate et son application à l’école suscite des débats houleux, comme en témoigne la remise du…
Questionnaire vidéo 2 :
  • Quelle est l’origine du mot « laïque » ?
  • Relevez différents symboles républicains visibles dans le reportage.
  • Quel est le principal lieu de mise en œuvre de la laïcité ? Expliquez pourquoi.
  • À l’aide du sujet mais également des textes ci-dessous, expliquez ce qu’est la laïcité et en quoi elle constitue un principe fondamental de la République française.
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Contexte historique (par Julie Le Gac)

Le terme de laïcité, aujourd’hui d’emploi courant, est créé à la fin du XIXe siècle, et s’avère difficile à définir. De fait, la laïcité doit s’envisager à plusieurs niveaux : philosophique, juridique et politique. Du point de vue philosophique tout d’abord, la laïcité va bien au delà de la séparation de l’Eglise et de l’Etat. Elle implique une conception des valeurs, de la société et de la République fondée sur la philosophie des Lumières, l’idée du progrès et la promotion d’une éthique non ancrée dans le religieux mais dans le rationnel. Si aucune loi ne définit la notion de laïcité, cette dernière constitue indéniablement un concept juridique. La loi de 1905 qui met en place la séparation de l’Etat n’emploie pas le mot de laïcité, et il faut attendre la loi de 1946 pour qu’elle soit érigée comme principe constitutionnel. Son article 1 dispose à cet égard que « La France est une République indivisible, laïque, démocratique et sociale ». La constitution de 1958 reprend cette disposition dans son article 2 et ajoute: « Elle [La France républicaine] assure l’égalité devant la loi de tous les citoyens sans distinction de race ou de religion. Elle respecte toutes les croyances. » La laïcité est enfin le produit d’une politique. Elle résulte historiquement d’une lutte entre l’Etat républicain et l’Eglise catholique, et de l’essor de l’anticléricalisme. Dès l’origine, il s’agit donc d’une laïcité de combat, indissociable de la construction de l’Etat républicain.
La laïcité constitue désormais un élément de l’identité française, et est voulue par certains comme représentative de l' »exception française ». Il n’est donc pas étonnant que les débats sur la laïcité connaissent un regain de vitalité, dans une période où la France, de par son intégration au sein de l’Europe, traverse une crise identitaire. Par ailleurs, la laïcité constitue dès l’origine un enjeu de l’Ecole républicaine. De fait, l’école, gratuite depuis 1881, devient obligatoire pour les enfants de 6 à 13 ans, et laïque, en 1882. La loi du 28 mars 1882 remplace l’instruction morale et religieuse par l’instruction morale et civique, supprime le droit d’inspection et de surveillance des ministres du culte prévu par la loi Falloux, et donne congé un jour par semaine aux élèves afin de faciliter l’exercice du catéchisme. En 2003, c’est également à propos de son application à l’école que ressurgissent les débats sur la laïcité.
Éclairage média
Diffusé à l’occasion de la remise du rapport de la commission Stasi, ce reportage s’attache à définir la notion complexe de laïcité. A cet égard, il requiert l’avis d’experts: un linguiste, Alain Rey, revient sur l’étymologie du mot laïque et un philosophe et historien, Henri Pena-Ruiz, s’interroge sur le rôle attribué à l’Ecole dans une République laïque. La succession de plans consacrés aux symboles républicains, la statue de Marianne, l’inscription « Liberté Egalité, Fraternité » sur la façade de bâtiments publics, tend à souligner la place de la laïcité, principe constitutionnel, au sein de la société française. Par ailleurs, le recours à des images d’archives, une gravure de Jules Ferry, une autre rappelant l’enlèvement des crucifix des salles de classe, permet de retracer l’histoire de la laïcité et d’insister sur l’ancienneté de ce principe, vieux d’un siècle. L’acuité toute particulière du débat sur la laïcité à l’école est soulignée par le biais d’images d’écoliers et de cours d’instruction civique inscrits sur un tableau noir.
Enfin, alors que le commentaire en voix off de ce reportage ne fait nullement référence à l’origine du regain de vitalité des débats sur la laïcité, deux images fortes rappellent l’importance de la question du voile. L’encart incrusté dans le coin supérieur gauche de l’écran lors de la présentation plateau, montre deux jeunes filles voilées, tandis que le reportage se termine sur un plan faisant défiler des enfants d’origine maghrébine, asiatique et africaine. La question de la laïcité soulève donc plus généralement celle de l’immigration et de la place de l’Islam en France, même si le document n’évoque pas ouvertement la question.
Transcription
Journaliste:Les vingt sages de la Commission Stasi sont allés bien au delà des questions du port du voile à l’école. On peut dire que pour la première fois depuis 1905, c’est un véritable état des lieux de la laïcité qui a pu être dressé en France, la laïcité est un principe constitutionnel, comme nous le rappelle Stéphanie Pérez.
Stéphanie Pérez: La laïcité, ou l’histoire d’une exception française, un principe constitutionnel, fondateur de la République, dont on comprend toute la singularité dès l’étude de son étymologie.
Alain Rey: Laïkos, c’est l’adjectif de laos, et laos, ça veut dire le peuple, c’est-à-dire que laïc, c’est ce qui s’oppose à clerikos, c’est-à-dire les gens savants, les gens qui savent écrire, les gens qui ont une fonction religieuse, en fait. Donc le laïc est celui qui n’est pas impliqué dans la vie religieuse.
Stéphanie Pérez: La laïcité implique donc la séparation des Églises et de l’État, c’est la loi de 1905. Chacun est libre de choisir sa religion, l’Église ne doit exercer aucun pouvoir politique, l’État aucun contrôle dans le domaine religieux, aucun financement du culte. L’État, qui doit être impartial, et les représentants de la fonction publique neutres. Au coeur de ce dispositif républicain, l’école : elle est censée forger des citoyens libres, donc responsables. A partir de 1881, Jules Ferry la rend obligatoire, gratuite, laïque, et il supprime l’instruction religieuse, puis les enseignants religieux.
Henri Pena-Ruiz: L’école, c’est le lieu où se forme la conscience humaine dans sa liberté. Et la question est de savoir si l’école est là pour conditionner les enfants à un message particulier ou si elle est là pour construire en eux l’autonomie et la capacité de ne dépendre que de soi.
Stéphanie Pérez: L’Église catholique mettra vingt ans à accepter que la religion ne relève plus que du seul domaine privé. Aujourd’hui, le concept laïc est de nouveau objet de débats, mais parce que la société française de 2003 affiche une plus grande diversité religieuse que celle de 1905.
wp-1456751256288.pngRésumé vidéo 3 : Lprincipe de séparation des églises et de l’Etat ne s’applique pas en Alsace et en Moselle. Cette exception, résultant de l’annexion de ces territoires par l’Allemagne entre 1870 et 1918, renforce le particularisme régional. (date vidéo 1984, durée: 03mn 51s)
Questionnaire vidéo 3
  • À l’aide de ce sujet, expliquez le statut des cultes en Alsace-Moselle.
  • Quelles sont les causes historiques de ce régime des cultes ?
  • Quels sont les avantages de ce statut des cultes ? Quels sont ses inconvénients ?
Contexte historique vidéo 3
Le principe de séparation des Eglises et de l’Etat ne s’applique pas en Alsace et dans le département de Moselle. Cette entorse au principe de laïcité s’explique par l’histoire. De fait, le 9 décembre 1905, lorsque la loi de séparation est votée par le Parlement français, ces territoires font partie de l’Allemagne. Dès lors, le Concordat de 1801, et les articles organiques s’appliquent toujours en Alsace et en Moselle. Au lendemain de la Première Guerre Mondiale, la France recouvre ces territoires, et, Edouard Herriot, président du Conseil à la suite de la victoire du Cartel des gauches, souhaite, en 1924, introduire les lois laïques en Alsace et en Moselle. Cependant, confronté à la farouche opposition de la population, et à la campagne menée par le général de Castelnau, il est contraint de renoncer. Le Conseil d’Etat déclare dans un avis du 24 janvier 1925 que « le régime concordataire tel qu’il résulte de la loi du 18 germinal an X, est toujours en vigueur dans les départements du Rhin et de la Moselle ». Un service des cultes est alors intégré à la Direction générale d’Alsace-Lorraine. En 1944, il est transformé en Bureau des cultes de Strasbourg et rattaché au ministère de l’Intérieur. Il gère aujourd’hui la carrière (leur nomination, et leur avancement) et le traitement d’environ 1500 ministres des quatre cultes reconnus en Alsace-Moselle (catholique, luthérien, calviniste et juif).
Dans le même sens, le principe de laïcité de l’enseignement primaire public ne s’applique pas en Alsace-Moselle. Il demeure régi par les lois Falloux de 1850. Ainsi aujourd’hui ces écoles, pour la plupart interconfessionnelles, conservent un enseignement religieux obligatoire donné séparément pour chacune des religions reconnues. Les établissements secondaires, eux, ne sont pas confessionnels, mais l’enseignement religieux y est obligatoire en vertu d’une ordonnance allemande de 1887. Toutefois, la possibilité pour les élèves comme les enseignants d’être dispensés de cet enseignement, est introduite en 1936 puis confirmée en 1974.
Encore aujourd’hui, le culte musulman n’est pas reconnu officiellement, malgré l’importance de cette communauté en Alsace Moselle (7%). Il ne bénéficie dès lors pas des subventions étatiques. La proposition faite en 1996 de créer une faculté de théologie musulmane aux côtés des facultés de théologie catholique et protestante de Strasbourg n’a pas encore abouti.
La non application du principe de séparation des églises et de l’Etat à l’Alsace et à la Moselle renforce le particularisme régional de ces territoires.
Éclairage média
Ce reportage explique de manière pédagogique le régime des cultes en Alsace-Moselle. Après avoir constaté, micro-trottoir à l’appui, l’ignorance de la population sur ce sujet, il rappelle les causes historiques de cette exception. Sur fond de musique religieuse, jouée à l’orgue, des images fixes de gravures puis de photographies retracent les principaux moments de l’histoire religieuse française et des guerres opposants la France à l’Allemagne. Un professeur de la faculté de théologie de Strasbourg s’attache quant à lui à expliquer, de manière plus érudite l’attachement des Alsaciens et Mosellans au concordat. Il souligne la singularité de ce régime des cultes, désormais détaché du gallicanisme et de l’ultramontanisme.
Toutefois, ce reportage examine le régime des cultes en Alsace-Moselle à travers le prisme de la religion catholique, et s’il mentionne brièvement le culte protestant, il n’évoque ni le cas de la religion juive, ni celui de l’Islam.
Transcription
Journaliste: Autre particularisme alsacien : le Concordat. Depuis Napoléon Bonaparte, il continue de lier très étroitement les églises alsaciennes à l’Etat. Paul Kobisch, cette situation très particulière s’explique par l’Histoire, mais une histoire que tout le monde ne connaît pas parfaitement ?
Paul Kobisch: Oui, c’est un sujet un peu tabou, Gérard. On le considère comme un trésor dont il vaut mieux ne pas parler. Et de fait, le régime des cultes est mal connu dans le détail. Un seul aspect est partout présent dans les esprits en Alsace Moselle. C’est la rétribution des ministres des cultes par le gouvernement. Mais il y a bien d’autres réalités spécifiques à ce régime. Des réalités qui sont, je dois le dire, bien difficiles à inventorier en cinq minutes.
Journaliste: Qu’est-ce que vous savez du statut local de la religion ?
Inconnu 1: Moi, je les connais pas tellement… je suis catholique comme ça, par filiation.
Journaliste: Vous ne savez pas qu’en Alsace Lorraine, il y a un statut spécial ?
Inconnu 1: Si, que c’est l’Etat qui paye les curés, là, …, autrement, le reste…
Journaliste: Vous ne savez pas ce que c’est un conseil de fabrique ? Non, pas du tout .
Inconnu 2 Un conseil de fabrique, en général, ça doit être des personnes qui se réunissent pour gérer les biens de la paroisse.
Jean Schlick: 5 juillet 1801. Napoléon Bonaparte scelle d’un trait de plume le destin des cultes religieux en France. Le Concordat met fin aux vissicitudes de la constitution civile du clergé héritée de la Révolution. Mais si les églises vont désormais jouir de la paix religieuse, ainsi que de la manne financière du gouvernement, elles vont être étroitement soumises au contrôle de l’Etat. Elles devaient même, dans l’esprit du futur empereur, contribuer à sa stabilité. 104 ans plus tard, en 1905, la loi de séparation de l’Eglise et de l’Etat mettra fin à cette situation. Mais l’Alsace et la Moselle font alors partie du Reich allemand. Ces églises resteront soumises à l’accord signé par Napoléon avec le Vatican. L’issue de la guerre de 14 n’y changera rien, non plus que la deuxième Guerre mondiale. Alors même que les nazis ont annulé le Concordat, eux aussi d’un trait de plume. Pour comprendre sa survie en Alsace Moselle, il faut comprendre un paradoxe. Un paradoxe qui s’explique par l’Histoire. En effet, ce concordat de Bonaparte et ces lois de Germinal, étaient le fait de tendances cléricales, c’est-à-dire qu’ils essayaient d’affirmer une mainmise de l’Etat sur l’Eglise. Cette région était une région qui, au cours du XIXème siècle, s’est de plus en plus attachée au pape. En ce sens, elle est devenue davantage ultramontaine. Mais ce qui s’est passé, c’est qu’au fur et à mesure des temps, l’Alsace a, d’une certaine manière, réussi à vider le concordat et le statut local -l’ancien statut-, a réussi à le vider de son premier contenu. Et en faire, reinterprété, relu, en faire vraiment quelque chose d’assez spécifique et qui n’est plus que matériellement en rapport avec la loi de Germinal, c’est-à-dire la loi promulguée du temps de de Bonarparte. En Alsace Moselle, les cultes religieux ont conservé leur caractère de service public, avec ses avantages et ses inconvénients. Parmi ces derniers, la nomination directe des ministres du culte par le gouvernement qui surveille directement la gestion des biens. Mais les avantages sont plus nombreux : exemples les subventions, le budget 84 du ministère de l’intérieur prévoit environ 180 millions de francs pour les prêtres, pasteurs et rabbins des trois départements. A noter encore, l’enseignement religieux dans les écoles ou le statut universitaire des deux facultés de théologie de Strasbourg. L’Etat octroie par ailleurs le caractère d’établissement publics à un certains nombre d’organismes ou d’institutions propres au culte. Parmi elles, le conseil de fabrique, chargé de gérer les biens de la paroisse.

 Deuxième séance. L’application du principe de laïcité

La laïcité s’applique dans les services publics. Elle se trouve cependant quelquefois remise en cause par certaines pratiques religieuses. Une Charte de la laïcité dans les services publics a ainsi été adoptée en 2007 pour y remédier. Par ailleurs, les services publics s’efforcent de s’adapter à certaines prescriptions religieuses. La laïcité ne se traduit en effet pas seulement par une stricte neutralité de l’État à l’égard des confessions religieuses. L’application de la laïcité tient également compte de la liberté de conscience et du respect de toutes les croyances. L’État est donc garant de la liberté religieuse. À ce titre, il doit rendre possible l’exercice des différents cultes. Les lieux de culte catholiques, protestants et juifs sont ainsi entretenus par l’État et les communes depuis la loi de Séparation des Églises et de l’État de 1905.
Problématique
  • Comment s’applique la laïcité dans les services publics ? Quels compromis peuvent être faits ?
  • Comment sont entretenus les lieux de culte ? En quoi cet entretien garantit-il la liberté de culte et de conscience ?
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Questionnement vidéo 4
  • Quelles difficultés les hôpitaux rencontrent-ils parfois dans l’application du principe de laïcité ?
  • Comment le service de gynécologie-obstétrique de l’hôpital de Villeneuve-Saint-Georges met-il en valeur la laïcité ?
  • Quelle institution a proposé la Charte de la laïcité dans les services publics ?
  • A l’aide du reportage et de la charte de la laïcité dans les services publics, présentez dans un tableau les droits et les devoirs des agents ainsi que ceux des usagers des services publics concernant la laïcité :

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